Une crise de colère à répétition, suivie d’une soudaine tendresse, peut survenir au sein d’un même quart d’heure. Les règles familières changent sans prévenir, et la constance du comportement s’efface derrière une alternance d’oppositions vives et d’élans d’indépendance.
Certains enfants traversent cette phase sans heurts majeurs, d’autres multiplient les défis quotidiens. Les repères éducatifs habituels s’en trouvent parfois déstabilisés, obligeant les adultes à ajuster méthodes et attentes.
Terrible two : comprendre cette étape clé du développement de l’enfant
Le terrible two, cette fameuse crise des 2 ans, s’invite dans la vie des familles comme une étape structurante du développement de l’enfant. Entre 18 et 24 mois, jusqu’à parfois 3 ou 4 ans, l’enfant s’éveille à son environnement, s’affranchit de l’autorité, revendique son autonomie. D’après Isabelle Filliozat, cette période d’individuation devient le théâtre d’une affirmation de soi qui s’exprime aussi bien contre qu’avec l’adulte. L’enfant découvre sa propre voie, souvent avec fracas.
On retrouve ici des airs d’adolescence. Maria Montessori l’avait noté : dans cette phase, l’enfant balance entre attachement et opposition, tout en cherchant de nouveaux repères. Le cerveau limbique, moteur des émotions, prend alors le dessus sur un néocortex encore en maturation (celui-là même qui orchestre la raison), alors que le cerveau reptilien dicte les instincts les plus bruts. Ce déséquilibre s’accompagne de réactions explosives et parfois déroutantes pour l’adulte.
Les crises de colère, les refus à répétition et la volonté de tout faire sans aide illustrent la construction de l’identité. L’enfant cherche une cohérence, teste les limites, s’oppose, mais réclame aussi la sécurité d’un cadre. Son développement du langage reste limité, ce qui complique la gestion des frustrations et amplifie l’intensité émotionnelle. Les parents, pris dans cette tempête, se retrouvent parfois déconcertés par l’ampleur des émotions de leur enfant.
Voici les dynamiques principales à l’œuvre dans cette période :
- Affirmation de l’individualité
- Développement émotionnel et cognitif en pleine évolution
- Des repères à façonner, des limites à explorer, des liens à renforcer
La terrible two période n’est pas un trouble, mais une étape déterminante : elle esquisse la personnalité future, prépare l’enfant à vivre avec les autres et place les adultes dans un rôle d’accompagnants, entre cadre rassurant et compréhension empathique.
Quels signes révèlent que votre enfant traverse le terrible two ?
Repérer une terrible two crise requiert d’observer de près les changements de comportement. Tout débute souvent par le fameux « non » répété à l’envi, signe d’une opposition naissante. L’enfant, en quête de lui-même, s’oppose, refuse des consignes simples, multiplie ce que l’on pourrait appeler des défis quotidiens. Cette attitude ne relève pas du caprice, mais exprime un profond désir d’autonomie.
Les crises de colère surgissent sans prévenir : pleurs, cris, parfois roulades au sol témoignent d’une frustration difficile à contenir. Le manque de mots pour exprimer ses ressentis rend ces moments plus intenses : on observe des gestes impulsifs, comme des morsures, des coups, des objets lancés, autant d’expressions physiques d’une émotion qui déborde.
Parmi les signes à surveiller, on retrouve fréquemment :
- Refus réitérés et oppositions constantes
- Colères retentissantes et soudaines
- Désir de tout accomplir seul, quitte à s’y prendre maladroitement
- Manifestations physiques : tapes, morsures, lancés d’objets
- Faibles ressources langagières pour partager ce qu’il ressent
La frustration résulte souvent de l’écart entre la volonté d’agir seul et les compétences réelles : chausser ses souliers, remplir son verre, décider de l’heure du coucher… L’adulte observe alors un va-et-vient entre besoin de proximité et rejet, recherche de contact puis refus. Pas de volonté de nuire ni de trouble sous-jacent : simplement l’envie de découvrir, de tester, de façonner peu à peu ses propres limites.
Des conseils concrets pour accompagner votre enfant au quotidien
Pour traverser la terrible two, rien ne remplace un cadre cohérent et constant. Les limites, si elles sont claires et tenues dans la durée, deviennent des repères sécurisants. Inutile d’accumuler les interdits : quelques règles nettes, exprimées avec fermeté et bienveillance, suffisent à structurer la vie familiale, même si l’enfant cherche à les contourner.
Adapter la communication est tout aussi décisif. Mettre des mots sur les émotions de l’enfant, nommer la colère, la frustration ou la tristesse, permet d’apaiser les tensions. Cette verbalisation, régulièrement recommandée par Isabelle Filliozat, aide l’enfant à réguler ses émotions et à réduire l’intensité des colères. À cet âge, l’acquisition du langage fait toute la différence pour éviter l’escalade et encourager l’expression autrement que par la violence.
Le renforcement positif joue un rôle clé : chaque effort d’autonomie mérite d’être valorisé. Félicitez votre enfant pour ses progrès, même minimes : ranger ses jouets, enfiler ses chaussures, oser demander de l’aide. Reconnaître ces réussites calme les tensions et encourage la confiance en ses aptitudes.
Intégrer une routine structurante aide toute la famille : horaires réguliers, petits rituels du coucher, séquences récurrentes qui jalonnent la journée. Cette prévisibilité apaise, rassure et facilite l’anticipation. La pédagogie Montessori, avec sa liberté encadrée et l’accent mis sur la motricité, propose aussi des outils efficaces pour canaliser l’énergie et nourrir la confiance en soi.
Si la situation s’enlise ou que les difficultés persistent, il est judicieux de consulter un professionnel de santé pour bénéficier d’un regard extérieur et d’un accompagnement adapté.
Petites astuces pour préserver l’équilibre familial pendant cette période
Maintenir un équilibre familial au cœur du terrible two demande de la souplesse et une bonne dose de solidarité. L’entourage devient un véritable appui : les familles solidaires traversent cette étape avec davantage de sérénité. S’appuyer sur un groupe de parents, même informel, permet de partager vécus et astuces, de relativiser les tensions et de trouver des pistes concrètes pour avancer.
Quelques pistes pour alléger le quotidien :
- Prendre du temps pour soi : confier son enfant à un proche, même une courte période, pour retrouver patience et disponibilité
- Organiser le quotidien : afficher le calendrier familial, répartir les tâches, alterner jeux et moments de repos pour mieux partager la charge mentale
- Cultiver des rituels accessibles à tous : préparer un petit-déjeuner ensemble, marcher sans but précis, inventer une histoire à plusieurs voix
Lorsque les tensions perdurent, consulter un professionnel de santé peut permettre de prendre du recul, de mieux comprendre la dynamique des crises, d’ajuster les réponses éducatives. Certains lieux comme les crèches, écoles ou relais parentalité proposent des ateliers d’écoute ou des séances collectives d’accompagnement : autant d’occasions de renforcer les liens et de sortir de l’isolement.
Les outils visuels, tels que les tableaux de routine ou les pictogrammes, offrent à l’enfant une représentation concrète du quotidien et limitent les quiproquos. Miser sur la simplicité, la répétition et la valorisation des petites victoires restaure la confiance de chacun et soutient l’harmonie du foyer.
La tempête du terrible two ne dure jamais éternellement. Un jour, sans qu’on s’en aperçoive, la porte claque moins fort, le « non » s’efface, et c’est une nouvelle complicité qui s’installe, patiemment construite, à la mesure des défis traversés ensemble.


